L’OBO immobilier (Owner Buy Out, ou vente à soi-même) est une solution patrimoniale permettant à la fois de développer son patrimoine, via un financement bancaire, tout en anticipant sa transmission.
Ce montage patrimonial permet de vendre un bien immobilier à une structure que vous contrôlez (comme une SCI), pour générer des liquidités, tout en gardant la propriété indirecte sur l’actif cédé.
Dans cet article, vous découvrirez ce qu’est un OBO immobilier, comment il fonctionne, quels sont ses avantages et ses inconvénients, et surtout si cette stratégie peut correspondre à votre profil.
Qu’est-ce qu’un OBO immobilier ?
L’OBO immobilier, pour Owner Buy Out, désigne une opération juridique et patrimoniale par laquelle un propriétaire vend un bien immobilier à une société qu’il contrôle lui-même, le plus souvent une SCI (Société Civile Immobilière).
Quel intérêt de vendre un bien que l’on possède à « soi-même » ?
En réalité, c’est une manière de transformer un actif peu liquide (comme un bien immobilier) en liquidités sans perdre le contrôle du bien.
Pour illustrer concrètement l’opération, la vente à soi-même se matérialise par :
- une personne physique qui détient un bien immobilier,
- une société créée qui rachète le bien immobilier via un crédit, souvent avec des membres de sa famille ou des associés de confiance,
- le vendeur qui encaisse le produit de la vente tout en conservant le contrôle du bien via sa participation dans la société.

Ces différentes opérations entraînent des conséquences juridiques et fiscales que nous aborderons par la suite. Plusieurs précautions doivent aussi être prises en compte.
Cette stratégie patrimoniale peut servir plusieurs objectifs :
- financer un nouveau projet personnel ou professionnel,
- préparer une transmission progressive à ses enfants,
- rééquilibrer son patrimoine entre immobilier et produits financiers,
- ou encore optimiser sa situation fiscale en choisissant une structure adaptée.
Comment mettre en place un OBO immobilier ?
La structuration d’un OBO immobilier se décompose en plusieurs étapes exposées ci-après.
1) Création de la société qui rachète le bien
La première étape consiste à constituer une structure juridique en mesure d’acquérir le bien.
Dans la grande majorité des cas, le choix se porte sur une Société Civile Immobilière (SCI), en raison de sa souplesse de fonctionnement. Toutefois, selon la nature du bien et la stratégie retenue, d’autres options peuvent être envisagées, comme la SARL de famille, adaptée à la location meublée.
Lors de la constitution de la SCI, il est recommandé de prévoir un capital social faible. En effet, si vous souhaitez injecter des fonds dans la société (par exemple pour rassurer la banque), il est préférable de le faire via un compte courant d’associé. Cette solution vous permettra de récupérer les sommes versées sans fiscalité, contrairement au capital social, qui reste bloqué.
La SCI doit comporter au minimum deux associés. Ensuite, la répartition du capital social entre chaque associé est stratégique : si l’objectif est, par exemple, de transmettre un bien à vos enfants, vous pouvez les nommer majoritaires dès la création, tout en conservant un pouvoir de gestion.
Enfin, il convient d’être attentif à la rédaction des statuts. La SCI offre une grande souplesse pour fixer les règles de fonctionnement notamment en ce qui concerne :
- les pouvoirs du gérant,
- les modalités de prise de décisions,
- les clauses de cession de parts,
- ou tout autre élément relevant de la rédaction des statuts.
2) Vente du bien à la société immobilière
Une fois la société créée, le propriétaire du bien immobilier vend le bien à la SCI.
Il est nécessaire que le prix de vente reflète la valeur de marché, afin d’éviter toute requalification fiscale. Une estimation par un expert indépendant est vivement conseillée.
Pour financer l’achat, la société contracte un emprunt bancaire. Obtenir un taux attractif est déterminant pour la rentabilité globale de l’opération.
Il est également possible de prévoir un crédit vendeur, c’est-à-dire que l’ancien propriétaire accepte de ne pas percevoir immédiatement tout le prix. Le crédit vendeur prend la forme d’un compte courant d’associé : vous restez créancier de la société, et pourrez vous faire rembourser progressivement en franchise de taxes par celle-ci.
⚠️ Si le crédit vendeur est prépondérant, l’administration fiscale pourrait requalifier l’opération et sanctionner le contribuable sur le fondement de l‘abus de droit. En effet, dans l’hypothèse où l’opération n’est pas majoritairement financée par un crédit bancaire, l’intérêt économique de l’OBO serait difficile à démontrer.
Après l’acquisition par la société, les loyers perçus serviront à rembourser le prêt bancaire et l’éventuel compte courant d’associé. C’est ce qui explique pourquoi l’option pour l’impôt sur les sociétés (IS) est souvent plus pertinente.
En effet, la société civile à l’IS (SCI IS) peut amortir le bien, déduire les intérêts d’emprunt, et ne pas être imposée sur les loyers tant qu’ils couvrent les charges. Le taux d’IS actuel (15 % jusqu’à 42 500 € de bénéfice, puis 25 %) rend cette option particulièrement intéressante lorsqu’aucune distribution n’est prévue à court terme.
💡 À noter : si le bien est destiné à la location meublée, une SARL de famille à l’IR peut être envisagée. Elle permet d’amortir le bien tout en restant à l’impôt sur le revenu, à condition que tous les associés soient issus de la même famille. Le choix entre SCI à l’IS et SARL de famille à l’IR dépendra alors des profils fiscaux des associés et de leur taux marginal d’imposition.
Enfin, des frais fiscaux s’appliquent à l’opération de vente et d’acquisition :
- du côté du vendeur, une plus-value immobilière peut être taxée, sauf si le bien est détenu depuis longtemps (exonération d’IR après 22 ans, et de prélèvements sociaux après 30 ans) ;
- du côté de la société, des droits d’enregistrement s’élevant environ à 7,8 % seront dus.
3) Gestion du bien immobilier et investissement des liquidités
Une fois la vente réalisée, la société devient propriétaire du bien. Elle gère le bien et perçoit les loyers, qui servent à rembourser l’emprunt bancaire.
De son côté, le vendeur dispose des liquidités issues de la vente à titre personnel. Le capital débloqué peut être placé, réinvesti, ou affecté à des objectifs familiaux ou entrepreneuriaux.
Une option couramment proposée consiste à verser ces fonds sur un contrat d’assurance-vie. Ce support permet de faire fructifier le capital dans un cadre fiscal avantageux, tout en nommant, par exemple, les enfants comme bénéficiaires en cas de décès.
Ainsi, pendant que la société rembourse son crédit grâce aux loyers, le vendeur capitalise, sans fiscalité immédiate, les sommes libérées par l’OBO immobilier.
Au terme du prêt, les associés par l’intermédiaire de la société détiennent un bien totalement remboursé. Et en parallèle, le vendeur a pu générer un rendement sur un capital auparavant bloqué dans la pierre.
Prenons un exemple :
Madame détient un bien immobilier à Lille, valorisé aujourd’hui à 450 000 €, acquis il y a plus de 30 ans par succession pour 300 000 €. Mariée sous le régime de la séparation de biens, ce bien lui appartient personnellement. Elle a deux enfants avec son époux et son patrimoine privé se limite à un livret A au plafond.
Cadre supérieure dans une société pharmaceutique, elle est imposée à une tranche marginale d’imposition (TMI) de 45 %. Le bien, loué nu, offre une rentabilité locative d’environ 7,5 % par rapport à sa valeur actuelle. Elle souhaite dégager du cash tout en optimisant la fiscalité de ses revenus fonciers, elle opte pour la création d’une SCI à l’IS.
Modalités de la mise en place de l’OBO immobilier :
• Création d’une SCI à l’IS avec un capital de 1 000 €, réparti entre Madame (10 €) et ses enfants (990 €) afin de préparer la transmission. Ainsi, les enfants sont associés à hauteur de 49,5% chacun et Madame à 1%. Elle prévoit d’être gérante de la SCI pour garder le contrôle.
• Un expert évaluateur intervient pour confirmer la valeur du bien (450 000 €).
• La SCI finance l’achat par un prêt bancaire intégral, y compris les droits d’enregistrement.
• Les loyers perçus couvrent intégralement les mensualités du prêt, sans qu’il soit nécessaire que Madame apporte des fonds en compte courant d’associé.
• Grâce à la longue détention (plus de 30 ans), il n’y a pas d’impôt sur la plus-value immobilière des particuliers à payer.
• Le capital généré de 450 000 € est placé dans deux contrats d’assurance-vie en ligne, bénéficiant de faibles frais de gestion et sans frais d’entrée.
Cette stratégie lui permet de profiter de l’effet de capitalisation pour préparer sa retraite et générer des revenus complémentaires.
Enfin, à son décès, elle désigne ses enfants comme bénéficiaires des contrats d’assurance-vie par parts égales. Cette transmission s’effectuera dans un cadre fiscal avantageux notamment grâce à l’abattement de 152 500 € * 2 soit 305 000 €.
Avantages et inconvénients de l’OBO immobilier
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Mobiliser des liquidités sans se déposséder du bien
Vous récupérez du capital à court terme, tout en conservant la maîtrise du bien via la société que vous contrôlez. -
Préparer une transmission dans un cadre structuré et fiscalement avantageux
En intégrant vos enfants au capital dès la création de la société, vous évitez l’indivision future et évitez les droits de donation. -
Profiter de l’effet de levier bancaire
L’achat du bien par la société est financé par un emprunt : vous utilisez l’endettement pour valoriser un actif que vous possédiez déjà. -
Optimiser la fiscalité des revenus locatifs
Si vous percevez des loyers imposés à l’IR (jusqu’à 62,2 % avec les prélèvements sociaux), passer par une société à l’IS permet d’en réduire drastiquement l’impact fiscal grâce à l’amortissement et à la déductibilité des intérêts d’emprunt.
-
Montage complexe sur les plans juridique, fiscal et bancaire
Il est recommandé d’être accompagné par un professionnel du droit pour choisir la bonne structure (SCI à l’IS, SARL de famille à l’IR), calibrer l’emprunt, rédiger les statuts ou encore gérer la fiscalité de la plus-value. -
Risque de refus du financement bancaire
L’opération repose souvent sur l’obtention d’un prêt. Un dossier solide et cohérent est indispensable pour convaincre l’établissement prêteur. -
Risque de requalification fiscale
L’administration peut contester le montage si elle estime qu’il a un but principalement fiscal. Pour éviter cela :- valorisez le bien de façon incontestable (expertise indépendante),
- assurez un fonctionnement réel et régulier de la société (AG, comptabilité, respect des statuts),
- justifiez l’opération par des objectifs économiques ou patrimoniaux (nouveau projet, transmission familiale…).
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Encadrement strict en cas de crédit vendeur
Si vous financez une partie de la vente vous-même (crédit vendeur), veillez à ne pas dépasser le seuil de 50 %, sinon vous vous exposez à une requalification fiscale. -
Nécessité de conserver le bien pour assurer la rentabilité de l’OBO
Pour que l’opération soit rentable, il faut conserver le bien plusieurs années, idéalement au moins jusqu’à la fin du prêt. Cela permet d’amortir les frais d’enregistrement et de constitution de la société. En cas de vente dans une SCI à l’IS, la plus-value peut être imposée, avec réintégration des amortissements pratiqués. De plus, la revente avec remboursement anticipé du crédit peut entraîner des indemnités de remboursement, ce qui augmente le coût global de l’opération.
L’OBO immobilier est-il fait pour vous ?
Un OBO immobilier peut être particulièrement pertinent pour certains profils et répond à différents objectifs patrimoniaux.
L’OBO peut être adapté à votre situation si :
- Vous détenez un bien immobilier avec une bonne rentabilité locative, idéalement au moins 7 à 7,5 % par rapport à sa valeur de marché actuelle.
- Le bien présente peu ou pas de plus-value imposable, notamment grâce à une détention longue (plus de 30 ans) permettant une exonération totale à l’IR et aux prélèvements sociaux.
- Vous avez une volonté de transmettre le bien à vos enfants ou vos héritiers, tout en gardant le contrôle via une société.
- Vous êtes propriétaire d’un patrimoine majoritairement immobilier, avec peu de liquidités disponibles, et souhaitez générer du cash à réallouer (ex. : contrats d’assurance-vie, investissements financiers, PER, etc.).
- Vous avez l’intention de conserver le bien sur le long terme, pour éviter les frottements fiscaux d’une revente anticipée (plus-value, amortissements réintégrés, indemnités de remboursement anticipé).
- Vous êtes fortement fiscalisé à l’impôt sur le revenu (ex : TMI à 41 % ou 45 %) et cherchez à réduire la pression fiscale sur vos revenus locatifs via une SCI à l’IS.
Ce qu’il faut retenir
L’OBO immobilier ou vente à soi-même est une stratégie patrimoniale qui permet de vendre un bien à une société que vous contrôlez, libérant des liquidités tout en optimisant fiscalité et transmission.
- Principe : Vendre un bien à une société (souvent à l’IS) pour obtenir du cash tout en gardant le contrôle.
- Buts : Financer des projets, transmettre aux héritiers, diversifier le patrimoine, réduire la fiscalité sur les revenus fonciers.
- Étapes : Créer une SCI ou SARL, acheter le bien via un prêt, rembourser avec les loyers, réinvestir les fonds issus de la vente.
- Avantages : Liquidités générées aujourd’hui à placer, transmission avantageuse fiscalement, effet de levier du crédit, fiscalité allégée.
- Risques : Complexité, frais, requalification fiscale, stratégie soumise à l’accord de la banque.
- Profils : Biens rentables (7-7,5 %), longue détention du bien immobilier, forte imposition (TMI 41-45 %), objectif de transmission patrimoniale.
- Conseils : Faire appel à un expert, valoriser au prix du marché, limiter le crédit vendeur, gérer la société rigoureusement.